Conduire le projet Lean Management en coopération avec les salariés
Il n'y a pas à tortiller, les projets Lean Management comme tous les autres projets d'organisation industrielle sont quasiment toujours conduits d'une manière autoritaire
du haut vers le bas. Les prescripteurs prescrivent et les salariés n'ont qu'à appliquer et exécuter.
C'est pour le moins assez imbécile de pratiquer encore cet anachronisme taylorien à notre époque où l'innovation fait la différence.
Bien au contraire, il s'agit de profiter pleinement de la participation de l'ensemble des salariés qui :
- 1) aiment le travail bien fait,
- 2) sont fidèles à leur entreprise et, last but not least,
- 3) ne sont pas plus bêtes que les prescripteurs !
Voyons une manière de procéder différemment...
L'article en résumé...
- L'approche traditionnelle des réorganisations, lean ou autres se déroulent toujours du haut vers le bas. Persuadés de détenir la solution, les prescripteurs l'imposent au personnel de l'entreprise et compte sur les diverses opérations d'accompagnement du changement pour faire avaler la pilule.
- Pourtant, il y a moyen de procéder autrement en établissant une étroite collaboration avec toutes les personnes qui seront chargées de vivre avec cette réorganisation.
- Non seulement on a plus de chance d'améliorer l'organisation, mais encore on gagne la coopération et la motivation des créateurs de valeurs que sont les salariés.
Le projet lean en coopération, "par le bas", bottom-up : un bon moyen pour en finir avec le mépris
La seconde partie du titre de ce paragraphe est un poil ambitieuse. Ce n'est évidemment pas en deux temps trois mouvements que l'on en finira avec le mépris en entreprise ! Cela dit, en commençant par un appel à une participation largement ouverte, c'est-à-dire en prenant réellement en compte les avis des personnes intéressées, on est certain d'en modérer les effets pervers.
Les "résistances" au changement, un bel euphémisme pour justifier la méthode "brutale"
Bien évidemment, avec cette manière de procéder, il faudra mouiller un peu plus la chemise. Il est évidemment bien plus facile de se contenter des techniques de déploiement traditionnelles et de se reposer sur l'autoritarisme brut dès que les bonnes paroles de bonheur assuré ne sont pas suivies d'effet.
Bien sûr, en imposant les solutions, on est certain de rencontrer "quelques résistances" ! Un bel euphémisme pour exprimer le mépris dans lequel on tient l'avis de tous eux qui devront "faire avec" la solution imposée !
De quoi donner du grain à moudre aux théoriciens de l'accompagnement du changement qui se chargeront d'envelopper la pilule en s'appuyant sur de nouveaux artifices révolutionnaires.
Au final, la plupart du temps, ça passe crème, en tout cas du point de vue :
- 1) des consultants en management qui sont déjà partis vers de nouvelles aventures organisationnelles
- 2) et de la direction qui prend le soin méticuleux de se tenir loin du terrain et des réalités du quotidien de ceux qui créent la valeur, c-à-d les salariés et le management intermédiaire.
Bien évidemment qu'ils parviendront à éteindre lesdites résistances et à imposer la nouvelle organisation et les nouvelles pratiques : entre la rébellion et le remboursement du crédit pour la maison, il n'y a pas photo !
Mais attendez Monsieur ! Vous ne pouvez pas écrire cela ! "Chez nous", on écoute les suggestions des salariés !
Ou, bien sûr encore faut-il que les dites suggestions ne finissent pas en classement vertical style les cahiers de doléances des gilets jaunes.
Cela dit, si réellement dans votre entreprise on procède différemment et bien tant mieux ! Ce n'est que l'exception qui confirme la règle. Et c'est bien sur ces exceptions tout à fait réelles que s'appuie l'étude de fond présentée dans l'ouvrage : "La transformation démocratique de l'entreprise".
Le préalable : changer de logiciel !
En fait, c'est toute cette approche qu'il s'agit de réformer pour engager la transformation, aussi minime soit-elle. C'est en totale coopération avec les intéressés, et ce dès les prémices du projet que se concevra l'implantation.
En jouant la carte de la coopération en parfaite intelligence avec tout le monde, ou tout au moins ceux qui le désire dans un premier temps (il faut parfois un peu de temps pour bien saisir le changement de principe), on découvre des pistes originales et l'on débusque des risques d'échecs potentiels suffisamment à temps pour opter vers une autre voie ou engager les palliatifs nécessaires.
Quel gain de temps !
Encore faut-il que les prescripteurs et surtout les dirigeants d'entreprise changent de logiciel.
Le consultant "Obtus" VerSus le consultant "Aigu"
Pour y parvenir, encore faut-il cesser
d'imposer l'usage des différents outils comme le pratique la large majorité des consultants en partant du principe :
"Ne vous inquiétez pas, on sait ce qui est bon pour vous, c'est normal, les experts c'est nous. En revanche, vous euh!..., c'est comment dire..."
C'est cela le mépris.
Lors de mes prestations d'assistance à la MOE ou MO, j'en ai croisé un bon nombre de consultants qui débarquaient avec leur boite à outils Lean Management et tentaient de les imposer sans même chercher à comprendre l'entreprise, ses salariés et ses habitudes:
"Nous on sait et ça marchera comme cela et pas autrement".
Pas de pot. Ce n'est pas comme cela que ça marche. Et ensuite, si on les laisse faire, ce sont les salariés qui essuient les plâtres.
Mais eux, ils s'en foutent. Ils sont déjà partis ailleurs avec la même recette toute faite.
Pensez les réorganisations industrielles : "autrement"
Mais attention, cet état d'esprit délétère n'est pas propre au Lean. On retrouvait les mêmes travers avec les autres méthodes d'organisation industrielle tels le
Six Sigma ou les
démarches qualité pour ne citer que celles-ci.
Un bémol toutefois pour modérer la charge contre le consultant dit "obtus"
- Déjà, s'il est salarié d'un cabinet assez important, il a des comptes à rendre. On lui a demandé de déployer une certaine solution, on s'attend à ce qu'il le fasse dans les limites du contrat passé avec le client et du budget prévu.
- D'ailleurs, le client n'est pas toujours blanc comme neige. Il achète une solution "packagé" de réorganisation censée garantir la bottom line, il tient à ce qu'elle soit appliquée dans les règles.
- Bon, bien sûr tous les dirigeants ne sont pas sur le même moule, il est toutefois bon de savoir que ceux-ci existent. Ils ont aussi souvent eux-mêmes des comptes à rendre à leur maison mère, à leurs actionnaires, à leur client quasi exclusif... etc.
- Il peut effectivement sembler risqué de changer d'approche même si le nombre d'échecs atteint des sommets stratosphériques dès que l'on y regarde de plus près dans la durée.
Bon après, il n'existe pas uniquement les "consultants obtus", heureusement il y a aussi de vrais professionnels expérimentés : les "consultants aigus".
La métaphore géométrique s'y prête bien.
Le "consultant obtus" s'imagine faire entrer toutes les entreprises dans son modèle. En revanche, le "consultant aigu" adapte son modèle à chacune des entreprises.
Légende: le consultant "obtus" se fiche comme d'une guigne des particularités de l'entreprise et de ses pistes d'avantages concurrentiels. Le problème ? Les consultants "obtus" sont nettement plus nombreux que les consultants "aigus" !
Mais alors comment procède le consultant "aigu" (avec aigu dans le sens de subtil et perspicace) ?
Cette question se traduit par celle-ci :
"Quel est le meilleur moyen de connaitre les pratiques de terrain ?"
.En effet, avant de
vouloir tout changer, encore faut-il comprendre ce
qu'il y a à changer. Et pour cela, il n'existe pas d'autres solutions que d'en discuter avec ceux qui créent la valeur. Ce ne sont pas les dirigeants mais bien les femmes et les hommes au charbon, qu'ils soient opérationnels ou fonctionnels.
Bien évidemment, c'est un poil plus difficile que d'imposer sa méthode en tablant sur l'accompagnement du changement qui, théoriquement, vaincra les résistances.
Légende: La roue du consultant aigu, subtil et perspicace. Les 6 verbes pour conduire un projet d'organisation industrielle, lean ou autre.
La méthode ? Elle tient en six verbes
1) On remise son mépris
Considérer les acteurs de l'entreprise, qu'ils soient devant un ordinateur, à une table à dessin ou en bleu dans l'atelier devant une machine, comme de véritables égaux dotés d'un QI équivalent au sien est un préalable. J'en ai croisé des rigolos en costard cravate bleu marine qui ne daignaient même pas les regarder. Quant à les écouter, t'imagine pas !
Pourtant, il faut bien comprendre que ce sont eux qui, de plus en plus aux prises avec des procédures lunaires, se battent et font jouer leur intelligence, expérience, compétence et réseaux pour créer la valeur !
Petit aparté : lorsque l'on accompagne une entreprise en
assistance MO MOA, il est toujours très instructif d'observer le comportement des prestataires en visite des bureaux et des ateliers. On mesure très rapidement leur niveau d'expérience à la manière dont ils se comportent, devant les équipes au travail ou les équipements industriels, quels qu'ils soient.
2) On observe
Très important pour bien saisir la réalité de la création de valeurs. C'est d'autant plus vrai pour le consultant expérimenté qui percevra plus aisément ce qui lui semble des handicaps (il en discutera par la suite) ou des avantages concurrentiels potentiels.
Pour tous les observateurs qui prennent le temps, c'est l'occasion de mieux saisir les finesses et subtilités du travail exécuté (réel) sans s'en tenir aux seuls fiches de fonction et procédures (prescrit) qui ne sont qu'une abstraction. C'est la réalité qui nous intéresse.
3) On écoute
Pas si aisé que cela tant la frontière entre les consultants (pour la plupart en tout cas) et les acteurs moteurs de l'entreprise semble difficile à franchir. Il faut faire l'effort, bien faire comprendre que non seulement on va les écouter, mais aussi que l'on va tenir compte de leur expérience, de leurs connaissances, que l'on va les respecter et que l'on va s'appuyer sur leurs avis et suggestions pour avancer.
4) On discute
C'est à dire que l'on invite à la conversation, que l'on échange les points de vue, que l'on compare les options, que l'on discute et que l'on discute encore afin que chacun sorte de ses certitudes pour mieux comprendre les raisons du point de vue adverse et prendre parfois conscience de l'intérêt de modifier sa position. Et ce, sans pour autant contraindre les exécutants aux éternelles difficiles concessions qu'ils regretteront par la suite.
5) On intègre dans son système de pensée
On discute, on observe, on écoute et on discute encore, et l'on intègre tout cela dans son modèle de pensée. C'est cela la recette gagnante ! Bien évidemment, tout ce travail préalable sert à forger une solution solide et durable. Aussi on profite des fruits de cette étude pour changer son mode de pensée et éliminer les a priori et les solutions toutes faites.
6) On propose
Il est temps de proposer une solution construite et réfléchie. Il n'est jamais inutile de relancer un cycle complet pour affiner et accroitre significativement les chances de réussite. On repasse donc par la première étape, afin de ne pas imposer cette nouvelle solution que l'on juge nécessaire optimale et d'accepter les critiques pour l'affiner. C'est du travail, mais c'est cela la mission d'un consultant.
Jusque-là ça va j'imagine, Tout cet exposé n'est que du bon sens même si en pratique il s'agit de
réinventer le management d'entreprise.
Arrivé à ce stade, on peut alors commencer à réfléchir sérieusement (il serait temps !) à considérer à sa juste valeur les apports de tous les membres de l'entreprise sans se référer à des règles d'autoritarisme totalement anachroniques.
De la démocratie en entreprise
Curieusement, dans nos sociétés modernes et civilisées, il est un lieu où la démocratie n'a pas le droit d'exister : c'est l'entreprise ! Il est plutôt paradoxal qu'au vingt-et-unième siècle le monde de l'entreprise pratique encore un cloisonnement autoritaire et sans concession entre une direction s'octroyant un pouvoir exclusif et des salariés, pourtant créateurs de valeurs, assujettis aux directives imposées.
Pourtant ne serait-ce que du point de vue économique, en un contexte exacerbé comme le nôtre actuellement, il serait peut-être temps de considérer ceux qui font marcher l'entreprise comme des partenaires à part entière.
La démarche proposée dans cet ouvrage se déroule en trois temps :
- Temps 1: décliner la méthode organisationnelle du moment, lean ou autre, en étroite coopération avec ceux qui devront l'assumer au quotidien. C'est une garantie de réussite
- Temps 2: Exploiter les ressources du Kaizen pour une nouvelle définition de la notion de performance bien plus large, intégrant au premier plan le confort et le bien-être de tous.
- Temps 3: Dix jalons pour changer les états d’esprit afin que la prise de décision collective et la coopération à tous les niveaux deviennent des évidences pour tous.
- Sources, références et bibliographie commentée.
La transformation démocratique de l'entreprise
Pour en finir avec le mépris, principe délétère du management d'hier et d'aujourd'hui
Alain Fernandez
Editeur : Mimismo
Pages : 350 pages
Prix : 19,90 Euros
EAN : 978-2959320422
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
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Faciliter la prise de décision à tous les niveaux
Il n'est que temps de partager le pouvoir et de décentraliser la prise de décision au plus près du terrain, là où se trouve l'information, là où l'action est possible. Encore faut-il au préalable réformer en profondeur la
"mesure de la performance" pour qu'elle soit au service des décideurs et non des gendarmes de l'entreprise.
Ensuite, c'est la
"prise de décision en équipe" qu'il s'agit de dynamiser afin de bâtir des organisations aussi pro-actives que respectueuses des créateurs de valeurs que sont les salariés. C'est là l'objet de ce livre qui présente en seconde partie la méthode SOCRIDE, expliquée et illustrée de cas concret.
- Partie 1: Réformer la mesure de la performance pour qu'elle soit un instrument de progrès et d'aide à la décision pour tous et non plus un absurde instrument de contrôle et de compétition individuelle.
- Partie 2: 7 étapes (SOCRIDE) pour mettre en oeuvre une prise de décision en équipe pleinement assumée.
Quand les équipes de terrain s'engagent et prennent les décisions responsables : la méthode SOCRIDE
Alain Fernandez
Editeur : Eyrolles
Pages : 320 pages
Prix : 25 Euros
EAN : 978-2212569285
Pour acheter ce livre :
L’auteur
Alain Fernandez consultant, formateur et auteur est un spécialiste du pilotage de la performance et de l’aide à la décision (méthodes Gimsi ® et Socride). Au fil de sa carrière, il a formé nombre de managers et conduit et accompagné de nombreux projets d'entreprise en France et à l'International. Plusieurs de ses livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème et connexes ont été vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et sont régulièrement réédités.
Son dernier ouvrage "La transformation démocratique de l'Entreprise", fondé sur plus de dix ans d'études auprès de coopératives essentiellement, expose une réforme concrète et profonde du management afin de faire entrer la démocratie dans l'entreprise.
Bibliographie, Webographie
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