Le Kaizen et l'amélioration continue, productivité, réduction des coûts, standardisation et... le bien-être des salariés ?
Le Kaizen, terme que l'on peut traduire en français par Amélioration Continue, est bien plus qu'une simple démarche de changement. Il s'agit à la base d'une véritable philosophie de développement en continu sans brusquerie ni grande réforme radicale, une approche nécessairement coopérative, fondée sur le bon sens commun.
Voyons le principe fondamental et la méthode.
Nous évoquerons ensuite un usage plus en phase avec nos attentes, c'est-à-dire une utilisation de l'instrument qui ne vise pas uniquement la quête de productivité, les réductions de coûts et accessoirement le service au client mais aussi et surtout le
bien-vivre des salariés.
Un voyage de mille kilomètres commence toujours par un simple pas. Lao Tseu
Définition du Kaizen
- Le Kaizen est une approche d'amélioration en continue d'origine japonaise, mise en place juste après la deuxième guerre mondiale, au cours de cette longue démarche de grande ampleur d'amélioration de la qualité des produits et des modes de production.
- Le Kaizen n'est ni un outil ni une méthode, mais bien avant tout une véritable philosophie de développement qui doit impérativement impliquer l'ensemble des acteurs concernés par l'amélioration.
- Le concept Kaizen est d'une large portée et ne se limite pas exclusivement au monde de la production ni même à celui de l'entreprise.
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Définition selon le JIS
Selon le Japan Industrial Standard, le Kaizen est une activité menée par un petit groupe ou un petit nombre de personnes pour étudier un système de gestion global ou une partie de celui-ci afin d’en améliorer la performance.
Le Kaizen en pratique
Cette brève définition ci-dessus est intéressante à plus d'un point. Elle évoque des petits groupes de travail et surtout elle met en avant l'étude du système à améliorer.
Et c'est un point essentiel.
Prendre le temps de bien analyser le système en utilisant les bons outils est la première condition de réussite de toutes opérations d'amélioration en continue. La seconde condition de réussite étant la
mesure du progrès que l'on verra plus avant au fil de cet article.
En résumé :
Comment faire ?
C'est une démarche orientée amélioration des
processus. La meilleure manière, c'est encore de
modéliser le processus à améliorer. La technique des
cinq pourquoi est particulièrement efficace pour identifier les meilleures orientations. Ensuite, on simplifie ce qui est trop compliqué notamment à l'aide d'une approche des
cinq S. Le but est d'éliminer tous les efforts et gaspillages inutiles.
PDCA
Le principe sous-jacent du Kaizen n'est autre que le fameux PDCA :
- P pour Plan, planification des actions à lancer,
- D pour Do, exécution des actions,
- C pour Control, vérification des résultats,
- A pour Act, correction et on reboucle.
La méthode d'amélioration continue en 7 étapes
Une démarche d'amélioration continue se déroule en sept étapes bien précises et de bon sens.
1) Identification du besoin d'amélioration
Au cours de cette phase, on choisit le problème à régler et on se concentre sur celui-ci. La situation actuelle pour une question précise n'est pas dans sa phase optimale. Elle mérite d'être améliorée.
Il existe donc un écart entre la situation actuelle et la situation optimale, et c'est cet écart qu'il s'agit de combler. Dans bien des cas, on ne va pas parvenir du premier coup à la situation optimale. C'est pour cela que l'on parle d'amélioration continue. On se contentera d'étapes intermédiaires acceptables (cycle PDCA).
Comment faire : C'est un travail en équipe où on liste, on évalue et on hiérarchise les problèmes à traiter selon l'impact et les moyens disponibles. Ne jamais perdre de vue que les travaux d'amélioration continue sont en sus des tâches quotidiennes.
On peut être confronté à des problèmes récurrents, de plaintes de clients, d'erreurs de livraison, de problème qualité, de procédures inadaptées...
Comme on ne va pas traiter tous les problèmes à la fois, on les classe selon une grille de critères simplissime : importance, urgence, moyens disponibles, solutions aisées à mettre en oeuvre, limitation de la surcharge de travail etc.
Remarque : Une grille de critères soigneusement définie en équipe est toujours la meilleure méthode pour parvenir à un consensus.
2) Étude de la situation
On travaille sur du concret, le problème doit être soigneusement précisé, clarifié. Pour se faire, on collecte des données fiables afin de bien estimer la faisabilité.
Il s'agit de travailler sur des données concrètes. L'étude des défauts, par exemple, ne doit pas laisser place aux croyances et autres superstitions que l'on connaît en entreprise. La meilleure solution reste encore d'exploiter le diagramme de Pareto pour bien différencier les vital few des trivial many. Autrement dit, cet outil simple d'emploi va nous permettre d'identifier les causes les plus importantes d'un phénomène.
Par exemple, dans ce graphe extrait du livre l'essentiel du tableau de bord © Editions Eyrolles, 60% des pannes sont causées par trois types de défaut. Les autres causes sont moins importantes et donc moins prioritaires. Il est alors évident que ce sont ces trois premières causes qu'il s'agit d'étudier en priorité.
3) Étude des causes
Il s'agit de trouver les causes réelles et de ne pas se contenter de causes les plus évidentes sans analyser plus avant. Un dysfonctionnement quelconque peut être le résultat d'une avalanche de causes.
Comment faire : Les cinq pourquoi sont le bon outil pour parvenir à identifier la cause initiale. il s'agit aussi d'être parfaitement exhaustif pour ne pas passer à côté de la ou des causes réelles. Un diagramme d'Ishikawa, qui met bien en évidence l'enchaînement des causes et de leur effet, est l'outil adéquat pour parvenir à un résultat acceptable.
Les spécialistes du Kaizen utilisent pour cette étape un diagramme arête de poisson simplifié comportant les quatre axes suivants :
- Humain : Connaissances, compétences, profil, santé, condition physique
- Soft : Système et méthodologie
- Hard : Matériel, équipement, outils, fournitures.
- Environnement : contexte de travail, disponibilité des outils, confort etc.
4) Identification des contre-mesures
On cherche maintenant le moyen d'éliminer les causes du dysfonctionnement ou tout au moins d'en limiter les effets néfastes.
On parle de
contre-mesure et non de solution. Il s'agit de palier au problème et non de chercher une solution universelle.
Comment faire : Les techniques d'inventivité collective, telles que le brainstorming, sont privilégiées pour lister les contre-mesures potentielles. Ensuite, on les valorise selon des critères du type : délai, ressources nécessaires ou encore difficulté de mise en oeuvre.
Bien évidemment, on préfèrera les contre-mesures les plus rapides à mettre en oeuvre, les moins gourmandes en ressources et les plus simples à déployer.
Comment faire : On se fixe alors un objectif de réalisation. Cet objectif ne sera pas nécessairement l'optimal. C'est un processus d'amélioration continue. L'objectif matérialise une situation qui sera acceptable pour le contexte actuel.
5) Mise en action des contre-mesures
Les contre-mesures acceptables ont été sélectionnées, il est temps de les déployer.
Comment faire : Il est important de fixer des dates et des responsabilités pour s'assurer d'une mise en oeuvre effective. Le bon outil pour préparer le tableau de suivi des contre-mesures est le fameux Qui, Quoi, Où, Quand, Comment, Combien, Pourquoi. Il s'agit de fixer des délais (quand ?) des moyens (Comment ? et Combien ?) et surtout des responsabilités (Qui ?).
C'est aussi à ce stade que l'on définit les indicateurs de performance et les tableaux de bord qui sont les instruments privilégiés pour mesurer la performance des actions lancées et les réorienter le cas échéant.
6) Audit des contre-mesures
Il est maintenant temps de s'assurer de l'efficacité des contre-mesures mises en oeuvre.
Comment faire : C'est une phase de contrôle. Est-ce que l'objectif fixé à l'étape 2 a été atteint ? Le point délicat est d'identifier les contre-mesures les plus performances si plusieurs ont été mises en oeuvre.
La meilleure solution pour évaluer l'efficacité des contre-mesures reste encore de se référer au Pareto que nous avons tracé à l'étape 2. A-t-il évolué positivement ? La difficulté sera d'identifier la contre-mesure la plus efficace si plusieurs ont été mises en oeuvre.
7) Standardisation des bonnes pratiques
Les contre-mesures les plus efficaces sont standardisées, documentées et diffusées.
Comment faire : Il s'agit de profiter pleinement de la démarche d'amélioration continue en généralisant comme "Bonnes Pratiques" les contre-mesures identifiées comme pertinentes, et surtout de bien les documenter. Elles répondent à une situation précise.
Il s'agit maintenant de documenter sérieusement les solutions trouvées si l'on souhaite les généraliser comme bonnes pratiques. Cette septième étape est un projet à elle toute seule. On n'oublie surtout pas l'indispensable effort de formation pour tous les salariés de l'entreprise.
La mesure, le Kaizen et les démarches d'amélioration continue
Par principe, toute amélioration continue est fondée sur un principe de mesures bien choisies et parfaitement partagées. Depuis les travaux d'Edwards Deming, l'usage intensif des statistiques est à la base des démarches d'amélioration continue et du contrôle qualité. Les
indicateurs de performance se révèlent alors dans toute leur utilité d'instruments de progrès.
Dans tous les cas il est essentiel de respecter le principe de la mesure :
- Des objectifs parfaitement en accord avec les attendus de l'amélioration et impérativement choisis par ceux qui sont en charge du système.
- Des indicateurs de performance cohérents et en phase étroite avec les objectifs pour assurer une mesure correctement étalonnée du progrès.
Ne pas oublier pour autant les ruptures salutaires...
Kaizen, Lean Management, Six Sigma sont des démarches qui s'inscrivent dans la continuité de ce qui existe déjà. C'est le principe de base.
Fondées sur un principe de mesure en continu, on cherche à améliorer autant que possible pour atteindre le summum de l'efficience.
C'est une approche qui a surtout bien fonctionné du temps où l'on pouvait envisager les économies d'échelle. Cela dit, c'est toujours vrai aujourd'hui pour améliorer l'efficience de bien des industries.
D'autre part, un des fondamentaux des démarches de type Kaizen est bien de développer le travail en équipe et la satisfaction des salariés, un besoin particulièrement sensible aujourd'hui plus que jamais. Kaizen exige en effet un effort consenti de l'ensemble des acteurs de l'entreprise.
Il serait bon cependant que la démarche de l'amélioration en continu de l'existant ne bloque pas la voie aux ruptures salutaires que sont les "innovations disruptives". Une réforme totale de l'organisation et des principes de production est bien souvent la solution pour affronter une concurrence toujours plus exacerbée et attirer des clients bien informés et donc plus volages. Les temps ont effectivement changé.
Le Kaizen au service de la recherche du bien-être des salariés
- Le principe du Kaizen, on l'a vu, repose sur l'intelligence collective des personnes concernées par l'activité à améliorer. Bien exploité, il s'agit effectivement d'un excellent instrument de développement continu.
Seulement, l'époque où tout un chacun se devait de se consacrer exclusivement à la production sans aucune retombée personnelle aurait dû être révolue depuis longtemps.
- Améliorer la productivité, réduire les coûts, améliorer le service au client, rechercher la standardisation des pratiques, sont quelque part l'objectif historique de la démarche.
- Il serait peut-être temps d'évoluer et de placer la recherche de pistes d'amélioration du bien-être et du bien-vivre des salariés comme objectif prioritaire.
- Focalisées sur l'objectif historique, les entreprises n'hésitent pas à réduire le peu de bien-être dont disposent encore les chargés de la production. On retrouve exactement les mêmes infâmes dérives dans l'univers du développement informatique. Le tout au nom de la sainte "productivité" qui se traduit surtout par une réduction drastique de tous les coûts.
- En bref, en persistant avec cette logique délétère, on passe totalement à côté des vrais enjeux durables d'une entreprise digne de ce nom qui sont :
- 1) Attirer et conserver les "talents" que l'on retrouve à toutes les strates de l'entreprise, et
- 2) dynamiser l'innovation et la prise spontanée d'initiatives heureuses, et là encore à tous les niveaux de l'entreprise.
- Bref encore une fois, il s'agit de changer radicalement de logiciel et c'est le sujet de l'ouvrage ci-après.
- Si en théorie, le Kaizen est fondé sur l'intelligence collective, il ne faut pas perdre de vue que le monde de l'entreprise est fortement hiérarchisé. Il ne sera pas évident (euphémisme !) de parvenir à un parfait consensus engagé et satisfaisant pour tous les participants.
Les managers soumis aux ordres de la direction auront tôt fait d'orienter le processus, malheureusement en dépit de la volonté de nombre d'entre eux. - D'autre part, le temps consacré à la recherche de piste empiétant sur le temps de production, le processus ne se déroulera pas de la manière la plus optimale (un second euphémisme). En règle (très) générale, les moyens optimaux pour accomplir une opération Kaizen digne de ce nom ne sont que trop rarement réuni.
- Tant que l'on se tiendra aux antipodes d'une démocratie digne de ce nom où le mépris n'est plus la règle de fonctionnement, on n'avancera pas sur le thème de l'intelligence collective. C'est le sujet du livre ci-après où la question du Kaizen tient une place majeur.
La transformation démocratique de l'entreprise
Pour en finir avec le mépris, principe délétère du management d'hier et d'aujourd'hui
Alain Fernandez
Sujet : Expérience concrète d'instauration de la démocratie au sein d'une PME
Pages : 360 pages
Prix : 19,90 €
Prix Format ebook : 9,49 € (epub ou kindle)
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
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En prime avec ce livre, gratuitement et réservé aux lecteurs,
l'ebook "le dictionnaire du lean" au format pdf.
L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de la mesure de la performance et de l’aide à la décision. Au fil de ces vingt dernières années, il a conduit et accompagné de nombreux projets d'entreprise en France et à l'International. Il est l'auteur de plusieurs livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème et connexes, vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et régulièrement réédités.
Ressources web
À lire...
Un guide pratique, orienté management et mise en oeuvre, écrit par un spécialiste du sujet...
Gemba Kaizen
A Commonsense Approach to a Continuous Improvement Strategy, Second Edition
Masaaki Imai
McGraw-Hill Education
448 pages
Dispo : www.amazon.fr & Format Kindle
Un guide pratique pour pousser plus avant la question cruciale de la mesure dans une démarche coopérative d'amélioration en continu pour parvenir à une prise de décision en équipe fondée sur un véritable consensus...
Les Tableaux de bord du Manager Innovant
Une démarche en 7 étapes pour faciliter la prise de décision en équipe
Alain Fernandez
Editeur : Eyrolles
Pages : 320 pages
Prix : 25 Euros
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