Un projet n'est pas un. Il est multifacettes. Chacun le regarde avec les yeux de sa profession, chacun le regarde avec les yeux de son ambition. Accompagner le changement, c'est prendre en compte l'aspect multiforme du projet. Autrement dit, il s'agit d'anticiper les résistances et de prévenir les inévitables conflits.
Conduire le changement, c'est parvenir à convaincre que le passage d'un état connu à un état inconnu présente bien des avantages. C'est jamais gagné d'avance !
Projet, changement et conflit
Changement d'habitude, changement d'attitude
Tout projet un peu conséquent ne se déroule pas sans un minimum de heurts et de grincements. Lorsque le changement d'habitude n'est pas choisi, on constate rapidement un changement d'attitude.
C'est naturel.
Il est donc important, dès les premières ébauches du projet d'entreprendre
la conduite du changement .
Les 5 catégories classiquement retenues
Attitudes et comportements
Classiquement, on a tendance à ranger les personnes concernées directement ou indirectement en catégories plus ou moins perméables.
Rapidement selon les approches, on retrouve :
- Les « je suis pour »
Regroupe tous ceux qui sont pour la finalité et les moyens choisis.
Argument type : « C’est une excellent solution, je la soutiens… ».
- Les « je suis pour mais… »
Regroupe ceux qui sont pour la finalité mais pas pour les moyens choisis.
Argument type : « C’est en effet une bonne chose, mais la méthode me semble inadaptée… »
- Les « je suis contre »
Ceux qui sont contre la finalité.
Argument type : « C’est inutile, ça ne sert à rien, ce sont de nouveaux problèmes en perspective… »
- Les « je ne sais encore »
Ceux qui sont encore indécis.
Argument type : « Je ne vois pas bien où l’on veut aller, je ne vois pas trop le rôle que je devrai tenir une fois cette nouvelle solution mise en oeuvre… »
- Les « je m'en fous »
Ceux qui ne se sentent pas concernés.
Argument type : « De toute façon, c’est toujours la même chose, ils demandent notre avis et n’en tiennent pas compte, donc qu’ils fassent comme ils veulent, comme d’habitude.
Éviter le manichéisme
Cette classification assez pratique, en tout cas pour l'esprit, a l'inconvénient de stimuler les comportements manichéens. En substance elle se résume à ce raccourci qu'affectionne les politiques notamment :
Vous refusez la finalité ou les moyens prévus parce que vous n'avez pas compris !" Et pour cela, il faut vous expliquer encore et encore afin de bien vous convaincre des bienfaits de la solution que l'on a choisi. De toute façon, il n'y a pas d'alternative, comme disait l'autre...
L'objectif n'est autre que de parvenir par tous les moyens disponibles à atteindre le seuil fatidique où la majorité des convaincus enlèvent le morceau.
Si c'était aussi simple que cela, un projet ne serait pas si difficile à intégrer. Un peu de temps pour expliquer, un ton convaincant, des propos chocs, un soupçon de manipulation intellectuelle et l'affaire serait dans le sac ! Le conditionnel s'impose.
Mais ce n'est pas suffisant, loin s'en faut !
Chacun bâtit sa propre stratégie
Lors d'un projet complexe, chacun construit sa propre stratégie selon ses intérêts, chacun a sa propre perception de la finalité. Même ceux qui ne se sentent pas concernés ont en fait une stratégie propre qu'il s'agit de comprendre et d'apprécier. De toute façon, ce ne sont pas ceux qui s'en foutent qui posent le plus de problèmes.
- Note 1 : Voir notamment l'article : Qu'est-ce qu'un bon chef de projet ?
Un bon chef de projet, c'est justement un acteur qui a bien compris que chaque intervenant direct ou indirect agissait selon ses propres motivations. Tout comme le chef de projet lui-même d'ailleurs !
Il y a déjà pas mal d'années, en 2004, Corinne Maier, en étudiant (et en justifiant d'ailleurs) le cas de tout ceux qui s'en foutent royalement, a réussi un véritable Best Seller avec son livre Bonjour paresse.
- Note 2 : Les séances de sensibilisation au changement sont un bon outil pour identifier les intérêts personnels.
Se méfier des revirements de situation
Les principales difficultés surgissent généralement en cours de projet lorsque le rapport de forces s'inverse, lorsque ceux que l'on avait classés dans la rubrique "supporters véritables" changent subrepticement de casaques. Au fur et à mesure de l'avancement, ils découvrent des phases qui ne servent plus leurs intérêts. Intérêts personnels ou intérêts du service dont ils ont la responsabilité, là n'est pas la question.
En tout cas, à leurs yeux, le projet présente de moins en moins d'attraits mais ils n'en disent mot. Voilà où se situe la vraie difficulté de la conduite du projet : chacun à sa propre échelle de valorisation de l'intérêt du projet et celle-ci évolue en cours de réalisation.
Pour éviter les mauvaises surprises, il s'agit de savoir à tout moment précisément qui est encore pour et qui ne l'est plus trop. En d'autres termes, il s'agit de prévenir les planches savonneuses qui pourraient être glissées subrepticement sous nos pas.
Analyse de la valeur
Si la communication (parler et écouter même les non-dits) est à la base de l'accompagnement, il faut cependant s'appuyer sur des instruments d'évaluation objectifs.
L'analyse de la valeur est un excellent outil pour exprimer en un langage commun l'intérêt de chacune des parties prenantes pour chaque aspect du projet, au lancement tout comme en cours de réalisation.
Cette approche assez efficace est un peu longue à développer ici. Si vous êtes intéressé, elle est décrite dans le livre de référence :
Le chef de projet efficace 5
ème édition .
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de la mesure de la performance et de l’aide à la décision. Au fil de ces vingt dernières années, il a conduit et accompagné de nombreux projets d'entreprise en France et à l'International. Il est l'auteur de plusieurs livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème et connexes, vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et régulièrement réédités.
À ce sujet, voir aussi
- Comment accompagner le changement durant le projet
Accompagner le changement pour manager efficacement le projet complexe jusqu'à son terme est une condition essentielle à la réussite. En effet, réaliser un projet complexe, ce n'est pas seulement mettre en oeuvre une technologie. Il s'agit de l'intégrer afin qu'elle soit pratique et nécessaire.
- Comment accompagner le changement du projet transversal
L'accompagnement des projets transversaux un peu conséquents nécessitent un soin particulier pour faciliter le changement en douceur. Les réunions de sensibilisation au projet sont le point de départ de la démarche de conduite du changement d'un projet transversal.
- Comment préparer le changement ?
Préparer le changement, le contenu des sessions de sensibilisation, les 5 étapes du déroulement, les thèmes abordés au cours des sessions de sensibilisation...
À lire…
Pour réussir les projets d'entreprise, adoptez une démarche qui dynamise le relationnel entre les femmes et les hommes. Le livre de référence du site…
Le chef de projet efficace
12 bonnes pratiques pour un management humain
Alain Fernandez
Eyrolles
6ème édition
240 pages
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Alerte sur la banquise, une fable à propos de l'accompagnement du changement…
Alerte sur la banquise !
Réussir le changement dans n'importe quelles conditions
John Kotter
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2ème édition 2018
163 pages
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Du même auteur…
Conduire le changement
Feuille de route en 8 étapes
John Kotter
Pearson
238 pages
Dispo: www.amazon.fr
Cette fable souriante vise à chasser nos émotions lorsque le changement est inévitable. Comment l'anticiper, dédramatiser la situation et pourquoi pas en profiter, et même trouver de nouvelles sources de satisfaction ?
Qui a piqué mon fromage ?
Johnson Spencer
Michel Lafon
120 pages
Dispo : www.amazon.fr
Une démarche concrète pratique et "outillée" de conduite du changement…
Méthode de conduite du changement
Diagnostic - Accompagnement - Performance
David Autissier, Jean-Michel Moutot
Editions Dunod
4ème édition
288 pages
Dispo: www.amazon.fr
Points de vue des lecteurs
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Éditeur : Eyrolles
Pages : 320 pages
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Voir aussi...
Ecrit par : Thibaud
La mise en place d'un référentiel commun fondé sur l'analyse de la valeur permet de répondre à cette interrogation essentielle. A+
Ecrit par : Alain
Très pragmatique, cette approche : en effet. Je rajoute qu'en management de projet, il vaut mieux avoir avec soi ses détracteurs - quite à leur donner un os à ronger -, plutôt que dans le dos. Par ailleurs, Edgar H. Schein a voix au chapitre, en matière de changement. Mmh, changer se fait, pour terminer, avec l'accord ferme de la direction : peut-être est-il pertinent, dans ce cas, d'interroger la finalité profonde du donneur d'ordres. Pourquoi désirez-vous le changement ? Et dans quelle mesure ? Etes-vous prêts à en payer le prix, jusqu'où irez-vous avec l'équipe projet ? Rien de pire, en effet, qu'une direction qui vous lâche (et vous lynche) en cours de route. En clair : changer, oui. Mais à plusieurs.
Ecrit par : Lionel
Merci Lionel pour ces compléments, comme toujours bien à propos Alain
Ecrit par : Alain
Dans l'article de l'usine nouvelle, je cite le CP doit : "Etre un bon communicant : un chef de projet doit être clair sur les objectifs du projet, expliquer sa façon de travailler, ses choix et ne pas hésiter à répéter... > Etre un organisateur : il sait structurer les travaux et obtenir l'engagement de toute l'équipe pour que ceux-ci soient réalisés. > Etre visionnaire : quand il commence le projet, il doit savoir ce qu'il veut. Quand arrivera la fin du projet, les besoins auront peut-être évolué. > Etre un gestionnaire : il va suivre en permanence l'avancement des travaux pour en faire une synthèse et réajuster le planning, tout en tenant compte du budget et des délais. N'est-ce pas la les stigmates du management autoritaire au lieu du management coopératif??
Ecrit par : Pierre-jean cherret
Effectivement, bien vu. C'est en tout cas le mode de management de projet le plus couramment pratiqué. On parle beaucoup de management cooperatif mais on le voit peu sur le terrain. Plusieurs raisons : Dans nos structures toujours autant hierarchisés, le culte du chef a la peau dure`et l'efficacité passe au second plan. D'autres parts, à la décharge de ceux-ci, avant d´inciter á la mise en place d'un manangement réellement coopératif, il serait bon de réfléchir au partage des responsabilités. Si je suis le seul á en porter le poids, je ne vais pas partager le pouvoir de décision. Pas fou. A plus, Alain
Ecrit par : afz
Je ne comprends pas très bien pourquoi vous prenez en référence le livre de corinne maier pour illustrer votre propos d'ailleurs fort bien développé. Personnellement, ce livre un peu provocateur ne m'a pas pas particulièrement enchanté. Mais ce n'est que mon avis. Bonne continuation
Ecrit par : isa
Merci pour ces commentaires éclairés. Pourriez-vous m'indiquer un organisme de formation susceptible d'intervenir en intra sur le thème "Accompagner le changement" Cordialement,Jean
Ecrit par : jean
La gestion de projet coopérative est selon moi très difficile à manipuler. Bien que l'implication de l'équipe dans l'orientation du projet peut effectivement décupler l'efficacité de celui ci, elle peut aussi faire perdre pied à l'équipe qui ne retrouvera plus les vertus du chef de projet directif qui a pour avantage de clairement tracer la route et ne pas suciter le doute dans l'équipe projet. On s'apperçoit au final que certains profils dans les équipes s'adaptent mieux à cette gestion coopérative alors que d'autres préfèrent tout simplement suivre. La difficulté du chef de projet est donc de savoir évaluer et doser ces style de management. Ci joint, exemple de projet très Top Down sur le Lean Management et ses conséquences : https://www.leandigestion.fr/l-excuse-facile-de-la-culture-dans-l-echec-d-une-transformation-lean/ Rodolphe
Ecrit par : Rodolphe