Indicateur et risque de la décision
Pour expliquer le principe du tableau de bord on utilise couramment la métaphore de la conduite automobile ou du pilotage d'un avion. Ce modèle simpliste est bien pratique pour expliquer les rudiments du pilotage. Mais une fois les bases acquises, il faut vite l'abandonner pour ne pas leurrer son auditoire. Ce modèle est en effet totalement faux. Une organisation quelle qu'elle soit n'a strictement rien à voir avec une automobile ou un avion. Voyons tout cela.
Une organisation, ce n'est pas une automobile
Pour expliquer le principe du
tableau de bord, on utilise souvent la métaphore de la voiture. Cette métaphore n'est pas juste. Une voiture réagit à la moindre sollicitation du pilote. Ce n'est pas le cas d'une organisation, d'un
processus ou d'une activité.
On pourrait dire que l'organisation a son inertie, mais il vaut mieux parler de son rythme propre qui se traduit par un phénomène d'hystérésis. En cela le pilotage d'une organisation est plus proche de celui d'une unité de production dans le monde du process industriel. Voir un exemple plus bas avec "Le Syndrome chinois".
Tout n'est pas permis et les effets des actions ne se font pas sentir en instantané. Le risque est toujours présent puisque l'erreur de pilotage n'apparaîtra pas immédiatement. Et celle-ci peut être fatale.
Prendre le risque de décider
On ne peut pas utiliser le schéma essais/erreurs : essayer, voir et corriger.
Non, il faut agir en toute conscience, attendre et rester aux aguets des premiers résultats qu'il ne faudra surtout pas confondre avec des effets de bord, mais bien sentir lorsque la dérive est réelle car, là, il faudra agir à nouveau. Voilà ce que c'est que le
risque de la décision.
Le seul élément de confiance, ce sont les
indicateurs. Ils ont fourni les éléments d'appréciation pour déclencher une action possible, ils mesurent en retour la réaction du système.
Un projet "human-centric"
En tout cas, réussir un
projet tableau de bord, ce n'est pas simplement une question de définition de
stratégie et
d'accompagnement du changement pour le mettre en oeuvre, comme je l'entends de temps à autre. Comme si les hommes étaient tous par définition de mauvaise volonté et, si ce n'est par la carotte et le bâton, ce sera par le sourire qu'il faudra les contraindre à piloter selon les desiderata d'une vague stratégie !
Ceux qui abordent la question ainsi n'ont jamais observé de près les hommes au travail. Je peux vous l'assurer.
Le Syndrome chinois
Pour bien comprendre les risques de piloter une unité sensible, il existe un excellent film :
Le Syndrome chinois.
Un film de James Bridges, avec Jane Fonda, Michael Douglas et Jack Lemmon.
Ce film date de 1979 et relate un accident dans une centrale nucléaire. Cet accident est camouflé au public afin de ne pas être contraint de stopper trop longtemps la production d'énergie, et surtout de ne pas gêner les autorisations pour en construire une nouvelle. Rassurez-vous brave gens. Les centrales sont sécurisées !
Chaque élément est vérifié 1 fois, 2 fois, 3 fois, chaque soudure est radiographiée. Bref, faites confiance au contrôle qualité.
Mais le chef de quart et responsable de la conduite de l'unité, joué par Jack Lemmon, met en doute certaines soudures. Il se rend compte que le contrôle qualité a été bâclé. Toutes les soudures n'ont pas été vérifiées... (pensez à l'EPR). Le danger est réellement là.
Bon, j'arrête là pour ne pas le spoiler mais ce film est une bonne étude du facteur humain avec toutes ses contraintes et défauts dans un monde régulé par la procédure et la norme d'une part, et par la politique et la loi des marchés d'autre part.
Peu de semaines après la sortie du film, c'était l'accident de la centrale de Three Mile island.
Certains critiqueront le côté un peu hollywoodien de la mise en scène et la mise en avant du journalisme d'investigation. C'est en tout cas une bonne préparation à la question du risque zéro...
Piloter le risque
Une bonne partie de ce film se déroule essentiellement au coeur même d'une salle de conduite. Jack Lemmon est parfait dans son jeu de chef de quart qui doit prendre ses responsabilités,
piloter le risque et utiliser uniquement ses indicateurs clés pour assurer son action.
Dans la première partie de ma vie professionnelle, je réalisais des postes de pilotage informatisés, des tableaux de bord donc, au sein d'unités de conduite de ce type. C'est là où j'ai compris l'importance d'un indicateur bien choisi, c'est là où j'ai vu comment le chargé de conduite, responsable en charge d'une unité autonome, automatisée mais fragile, pilotait et essayait d'en tirer le meilleur.
C'est dans cette relativement longue expérience auprès de ces hommes qui savent évaluer le risque qu'il faut chercher les origines de Gimsi ®. C'est pour cela qu'elle est essentiellement centrée sur l'homme et le risque de la décision.
Ressources web
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
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L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de la mesure de la performance, de l’aide à la décision et de la conception de tableaux de bord de pilotage. Au fil de ces vingt dernières années, il a conduit de nombreux projets de réalisation de système décisionnel en France et à l'International. Il est l'auteur de plusieurs livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème, vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et régulièrement réédités.
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