Construire le collectif de l'entreprise pour des équipes responsables et engagées
Un collectif, en entreprise comme ailleurs, c'est avant tout un ensemble d'individualités partageant des valeurs communes pour agir de manière concertée. Pour autant, pour parvenir à constituer un collectif d'entreprise efficace, il ne suffira pas de simplement regrouper des individus qui, comme par magie, décideront d’agir de concert pour atteindre les objectifs fixés. En revanche, il s'agira de composer un grand RÉCIT en 5 lettres :R.E.C.I.T... Avec R comme Respect de tous envers tous, E comme Échanges constants C comme Consensus actif I comme Intelligence collective T comme Trouble-fêtes
Résumé
Le rôle d'un collectif c'est de s'appuyer sur des valeurs communes pour prendre les décisions fédératrices et agir en intelligence pour atteindre les objectifs acceptables et acceptés.
- R comme Respect Le respect de tous envers tous, antonyme du mépris, est le fondamental de toutes relations constructives, c'est suffisamment évident pour ne pas avoir besoin de se lancer dans de grandes démonstrations... En entreprise, nous en sommes encore très loin...
- E comme Échanges constants Construire l'indispensable connaissance pour prendre les décisions opportunes passe nécessairement par des échanges constants, en interne et en externe.
- C comme Consensus actif Une décision collective se doit d'être fédératrice. Encore faut-il parvenir à des consensus actifs, c'est-à-dire ni "mou", ni "contraint" mais bien fédérateurs. Pour cela, il importe de bien maîtriser l'art du conflit productif.
- I comme Intelligence collective C'est seulement en passant par les trois étapes précédentes: R,E,C que l'on peut espérer construire une intelligence collective, seule solution pour franchir les inévitables obstacles et innover en permanence.
- T comme Trouble-fêtes Bien évidemment, comme dans toutes sociétés humaines, il y a les trouble-fêtes qui pour différentes raisons ne comprennent pas l'intérêt de la coopération et ne jouent pas le jeu. Si on ne parvient pas à les convaincre, la seule solution c'est de les inviter à rejoindre une entreprise qui fonde sa performance sur la compétition individuelle. Ils y retrouveront leurs alter ego.
Un collectif, ça se construit !
Et cela, on le sait depuis déjà pas mal d’années.
En effet, selon le Petit Robert:
"un collectif est un groupe de personnes réunies pour délibérer et prendre des décisions."
Encore faut-il être en mesure de prendre des décisions !
C'est-à-dire :
- 1) Être suffisamment impliqué dans la marche de l'entreprise pour avoir envie de prendre les décisions éclairées.
- 2) Être suffisamment informé pour prendre les bonnes décisions.
- 3) Être suffisamment reconnu pour défendre son point de vue.
- 4) Être suffisamment confiant pour ne pas craindre que son point de vue argumenté passe à la trappe sans explication.
C'est ce que l'on attend d'une entreprise parvenue à l'âge "adulte" qui a compris que la très large majorité de salariés sont attachés à leur entreprise, ont foi dans son avenir et sont prêts à mettre en commun leur intelligence respective pour surpasser les obstacles présents et futurs.
Bref, c'est d'une
réforme en profondeur du management dont on a besoin urgemment.
Comment rater son collectif avec le team building et le culte du leadership
Ne pas prendre les salariés de l'entreprise pour des truffes sera un bon point de départ.
Ni team building, ni leadership
S'imaginer que ce sera avec les artifices infantilisants du
team-building que l'on y parviendra est une première erreur. La seconde sera de les considérer comme des brebis dans l'attente de leur berger, autrement dit d'un
leader doté d'un charisme hors du commun, pour les conduire et les motiver dans la bonne direction.
Ce que l'on recherche au contraire, ce n'est pas très compliqué, c'est juste la participation active de tous.
Cela devrait tomber sous le sens pour une organisation composée d'adultes en pleine possession de leurs moyens.
Tout commence par un « grand R.É.C.I.T »...
- Il s’agit de donner du sens, de démontrer et de faire savoir que le mépris inhérent au management d’essence taylorienne a vécu.
- Bref, c’est le Respect qu’il s’agit de mettre en avant, d’assurer que tout un chacun a le droit et le devoir de donner et de défendre (d'argumenter) son point de vue sur les questions essentielles à la vie de l’entreprise.
- C’est aussi la certitude que son avis sera écouté, critiqué et retravaillé en commun pour construire quelque chose de positif et de consensuel.
- C’est évidemment plus aisé à écrire qu’à réaliser puisqu’il s’agit ni plus ni moins de réformer le management afin de le couper de ses racines archaïques d’essence taylorienne et Fayoliste.
Taylor : tout est formalisable
Pour Taylor, toute tâche aussi complexe soit-elle (le travail d’un tourneur-fraiseur n’est pas simple tant s’en faut) doit être codifiée dans ses moindres détails afin d’assurer une division du travail (déjà
prônée par Adam Smith et critiqué par Alexis de Tocqueville), pour mieux le contrôler.
Décrire en procédures les tâches dans ses moindres détails c’est aussi le moyen de rendre les salariés interchangeables et de détruire ainsi le pouvoir du professionnel.
Procédures, démarches qualité, travail prescrit et travail réel
Au passage, il est tout de même particulièrement incongru de constater que, notamment impulsées par les
démarches qualité successives depuis trente ans, nous en sommes encore dans cette dimension procédurale de la tâche à exécuter.
Les efforts que déploient les salariés pour combler l’écart entre le travail prescrit et le travail réel (lire et relire Christophe Dejours) passent encore inaperçus aux yeux des prescripteurs.
Cette non-reconnaissance du travail réel et des efforts déployés pour détourner les procédures afin d’accomplir leur mission de création de valeurs est vraisemblablement une des principales raisons du mal de vivre au travail dont souffrent nombre de salariés, quel que soit leur rôle ou leur fonction dans l’entreprise.
Pourquoi un tel aveuglement des prescripteurs ?
- 1. Le mépris inhérent au management tel qu’il est encore pratiqué aujourd’hui explique une grande part de cet aveuglement. Les prescripteurs imposent des solutions quasiment toutes prêtes sans trop tenir compte, en tout cas au-delà de la forme, des spécificités de chaque situation pouvant être expliquées par les opérationnels.
- 2. Le besoin de standardiser les tâches et les rôles est aussi un outil de domination dans le sens où le salarié ne peut pas exprimer son propre pouvoir de compétence en se réclamant de son métier.
- 3. D’ailleurs, les intitulés des métiers exercés ont quasiment disparu pour être remplacés par des désignations de postes propres à chaque entreprise. C’est un bon moyen pour justement gommer les personnalités et rendre les individus interchangeables, toujours dans l’esprit Taylor.
C’est aussi pour cela que l’on peut dire que l’entreprise est toujours dans une dimension taylorienne. Puisque formaliser les tâches pour
rendre les individus interchangeables tout en détruisant leur
pouvoir de compétence était justement le but recherché par Taylor (lire ou relire :
Principes d'organisation scientifique Frederik Taylor 1911)
Retrouver la fierté de son métier, c’est une étape fondamentale de la construction du Grand Récit
La fierté de maîtriser son métier, de voir son travail reconnu et apprécié, c’est aussi le moyen
d’affirmer sa personnalité dans l’entreprise et de ne pas être un pion interchangeable. C’est aussi ainsi que l’on parviendra à créer de solides échanges entre pairs et construire des consensus actifs. (on le verra plus avant).
C’est tout cela que depuis un peu plus d’un siècle on cherche à détruire et qu’il s’agit de retrouver actuellement. C’est aussi cela le respect.
Pour Fayol : tout est organisable
Henri Fayol, fortement inspiré par les travaux du Maréchal Lyautey sur l’organisation militaire, développe le modèle hiérarchique structuré en division plus ou moins hermétique de l’entreprise (Lire et relire :
L'Administration industrielle et générale. 1916).
Sans s’appesantir, sur ce sujet que la plupart d'entre nous vivent au quotidien, retenons simplement cette critique de l’organisation hiérarchique de James G. March :
« L’idée est que les problèmes et les actions peuvent être décomposés en éléments eux-mêmes composés de sous-problèmes et de sous-éléments de telle manière que leurs interactions puissent être organisées au sein d’une hiérarchie », n’est qu’un mythe de l’entreprise. « La hiérarchie génère des illusions de contrôle et de responsabilités » (source : Revue Française de Gestion 9/10/1998).
Dossier PDF: "Bâtir le collectif" à télécharger...
Construire le collectif en entreprise
Extrait PDF :Un collectif, c'est avant tout un ensemble d'individualités partageant des valeurs communes pour agir de manière concertée.
Pour autant, pour parvenir à constituer un collectif efficace, il ne suffira pas de simplement regrouper des individus qui, comme par magie, décideront d’agir de concert pour atteindre les objectifs fixés.
Un collectif, ça se construit ! Et cela, on le sait depuis déjà pas mal d’années...
Le respect « R » est donc le premier stade de notre « grand R.E.C.I.T »
Le Respect de tout un chacun par tout un chacun, c’est le fondamental pour parvenir à un construire un collectif responsable et engagé.
Une nouvelle définition de l’entreprise accordant la part belle aux créateurs de richesse
La première opération de notre grand récit sera d’apporter une
nouvelle définition de l’entreprise pour compléter la dimension financière et capitalistique traditionnelle.
Qu'est-ce qu'une entreprise ?
- Pour l’INSEE une entreprise est « une unité économique, juridiquement autonome dont la fonction principale est de produire des biens ou des services pour le marché. »
- Pour un investisseur ce sera quelques ratios financiers censés justifier de la santé de l’entreprise et permettant d’interpréter avec plus ou moins de risques d’erreur ses possibilités de profits à plus long terme.
Ces deux définitions sont importantes, aucun doute à ce sujet.
Cependant, pour créer un collectif responsable et engagé, il va s’agir de prioriser une troisième définition qui place au premier plan les femmes et les hommes de l'entreprise qui sont les
véritables créateurs de richesse.
Légende : Ce graphique est extrait du livre : « la transformation démocratique de l’entreprise »
1er Extrait du livre : Le premier jalon
Si on laisse un peu de côté la
perspective comptable, on découvre qu’une entreprise c’est avant tout des humains avec leurs envies, leurs besoins, leurs ambitions, leurs préoccupations et bien sûr leurs savoir-faire et leurs savoir-être. Les femmes et les hommes de l’entreprise ne sont en rien une
« ressource » fut-elle humaine.
2nd Extrait du livre : premier jalon
L’entreprise n’est pas une société anonyme
Une entreprise, c’est un lieu physique où des femmes et des hommes se côtoient et éprouvent des émotions plus ou moins avouées ou réprimées ; c’est un cadre de vie où s’expriment des passions créatrices, collégiale ou individuelle ; c’est un environnement complexe où se manifestent des élans de joie et d’émulation collective, mais aussi de tristesse, de déception, de colère rentrée avec leurs conséquences néfastes pour la santé : burn-out et dépression.
Tout cela ne se mesure pas en données quantitatives et ne se retrouve pas dans les
reportings simplificateurs à l’extrême. Les dirigeants dans leur tour d’ivoire ne voient que des chiffres, des gains et des coûts. Il ne s’agit pas d’ignorance, mais bien d’une volonté de camoufler tout ce qu’il y a d’humain.
Management... humain ?
La fonction du management a toujours été de gommer les individualités : soit à coups
d’autoritarisme, « je ne veux voir qu’une tête », la standardisation « forte » des qualifications, des compétences, et des procédés en sont une déclinaison ; soit en les considérant comme une bande de lemmings suivant aveuglément le « leader ». Le
culte du « leader charismatique» ou encore du
« gentil » manager « bienveillant » est symptomatique de cette fiction, de ce monde artificiel de l’entreprise qui élude les personnalités qui la font exister.
On lit et on entend de plus en plus d’invocations implorant les dirigeants « d’introduire un peu d’humain » dans l’entreprise. C’est pour le moins paradoxal. Qu’est-ce donc qu’une entreprise sinon des humains ? Mais peut-être faut-il comprendre « introduire un peu d’humanité » et là, le message est beaucoup plus clair tout comme la dénonciation de l’inhumanité de l’entreprise actuelle que révèle en creux une telle supplique.
Il importe aussi de bien comprendre que la démocratie participative, ce n’est pas du blabla
Bien évidemment que la
démocratie participative dans l'entreprise et
la prise de décision collective ne sont pas des paroles en l’air. Il est tout de même surprenant qu’elles soient à ce point absente de l’entreprise, un lieu où l’on passe une bonne part de sa vie.
- En plus, il faudrait accepter d’être motivé, engagé, ne pas compter ses heures et tout en étant écarté de la moindre décision d’importance ?
- Et dans certaines entreprises bien plus nombreuses qu’on l’imagine, il faudrait trembler à chaque discours du président annonçant des temps difficiles à venir pour ne pas faire partie de la prochaine charrette de licenciement, puisque la transparence des plans décisionnels est plus qu’opaque ?
- Il faudrait accepter sans broncher ni pouvoir donner son avis sur les réorganisations qui perturbent plus qu’autre chose, puisque les prescripteurs ont tranché ?
Voilà encore une des causes du mal-être des salariés en entreprise !
En troisième partie, ce livre développe en 10 jalons les 5 lettres du grand RECIT
Respect, Échanges, Consensus, Intelligence collective et trouble-fêtes
Avoir du temps pour soi
Après, ce qui fera toute la différence et marquera une nette évolution vers une société digne de son époque, ce sera d'accorder du temps pour que chacun puisse vaquer à ses propres aspirations.
John Maynard Keynes, dès 1930, prévoyait qu'un siècle plus tard, grâce à la technologie qui entrainera une progression de la productivité, on ne travaillerait plus que 15 heures par semaine.
L'évolution de la productivité est bien conforme à sa prévision, mais malheureusement c'était sans compter sur la cupidité des détenteurs du pouvoir. Ils ont su inventer les bullshit jobs (David Graeber) et culpabilisent régulièrement les salariés de ne jamais travailler assez...
Imaginez si lesdits salariés disposaient de temps pour eux. Ils pourraient réfléchir sur l'intérêt de perdre son temps à produire des choses pas toujours nécessaires, ils se poseraient de sérieuses questions sur les impacts écologiques de la production et ne comprendraient plus la nécessité d'un principe hiérarchique et autoritaire un poil moyenâgeux.
La solution a vite été trouvée : autant qu'ils travaillent comme des bêtes de somme en gagnant juste ce qu'il faut. Ils rêveront alors de carriérisme et ne disposeront pas de temps pour des questions dérangeantes pour les pouvoirs en place...
Ces quelques points ne sont qu’un bref résumé de la troisième partie du livre : « la transformation démocratique de l’entreprise »
Remarque : Bien évidemment, une telle démarche est bien plus efficace au sein
d’une coopérative bien constituée. Il est simplement curieux et assez significatif que le modèle de la coopérative, dont les statuts comportent un principe de démocratie participative, ne soit pas plus développé dans notre pays.
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
Voir ici les réponses aux questions Pourquoi ce livre ? Pour qui est-il écrit ? et Comment se déroule l'étude ?
Quatre Livres blancs en accès libre
L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de l’aide à la décision et de la mesure de la performance dans le cadre des démarches d’amélioration continue. Il travaille depuis plusieurs années sur les principes de la coopération comme unique solution pour équilibrer les enjeux économiques, environnementaux et humains. Il est l’auteur de plusieurs livres de management qui anticipent la démarche ici présentée, chacun vendu à plusieurs milliers d’exemplaires.
Les ouvrages du même auteur
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Piloter l'Entreprise Innovante...
La prise de décision en équipe ne s'improvise pas. Pour parvenir à ce mode de management délégataire, crucial pour les organisations actuelles, privées comme publiques, un indispensable travail de fond prélable est nécessaire. La méthode SOCRIDE centrée sur les questions incontournables de Confiance et de Reconnaissance est ici expliquée, illustrée et détaillée :
Les tableaux de bord du manager innovant
Une démarche en 7 étapes pour faciliter la prise de décision en équipe
Alain Fernandez
Éditeur : Eyrolles
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