La gouvernance en trois questions : QUOI ?, POURQUOI ?, COMMENT ?
La gouvernance en quelques mots n'est autre que la mise en oeuvre d'un ensemble de dispositifs (règles, normes, protocoles, conventions, contrats…) pour assurer une meilleure coordination des parties prenantes d'une organisation, chacune détenant une parcelle de pouvoir, afin de prendre des décisions consensuelles et de lancer des actions concertées. Mal appliquée et souvent abusivement utilisée, il n'est que temps de passer à une gouvernance participative et démocratique.
Résumé:
L'instauration dans les règles de l'art d'une gouvernance d'entreprise est désormais une exigence. Il s'agit en effet de garantir un pilotage de l'entreprise moins sensible aux ambitions personnelles individuelles ainsi qu'aux puissances financières. La clé ultime étant de parvenir à un pilotage orienté stratégie en accord avec les parties prenantes. Autant de thèmes qui exigent des réponses précises. La finalité ultime étant d'accéder à une
gouvernance participative et démocratique pleine et entière.
La bonne gouvernance est la seule solution pour mettre fin à la pauvreté et soutenir le développement.
Kofi Annan, Ancien secrétaire général des Nations Unies.
Quoi ? Une notion complexe et délicate à cerner
Selon le Petit Robert, le terme de "gouvernance", né au XIIIème siècle, s'appliquait aux bailliages de l'Artois et de la Flandre.
Il nous revient par l'anglais "governance" au cours des années 90 pour tenter de définir une notion assez complexe et encore pas mal abstraite dans les faits.
Définition pratique et concrète
La gouvernance d'entreprise est un système, d'autres diront un processus, par lequel l'entreprise est dirigée et contrôlée afin de
gérer et protéger les intérêts de toutes les parties prenantes.
L'enjeu étant d'améliorer la performance au sens de chacune des parties prenantes sans pour autant déroger aux règles juridiques et aux statuts établis par l'entreprise (
extrait des nouveaux tableaux de bord des managers).
Légende : il ne que temps de passer à la gouvernance participative et démocratique pour que tous les "acteurs" de l'entreprise participent... "Acteurs" au sens de tous ceux qui "agissent" pour créer la valeur
Pourquoi instaurer la gouvernance ?
La complexité croissante, fruit de la globalisation, a pas mal secoué les archaïques structures et les rapports de forces bien établis. L'ouverture des marchés, tout comme les diverses dérèglementations imposées par la libre concurrence, déstabilise la fragile stabilité de naguère.
Plutôt qu'un équilibre, la multiplication des flux, financiers, matières, produits, humains et culturels est susceptible d'engendrer une forme de nouveau Far-west1 étendu à la planète. Voilà pourquoi les plus raisonnables en appellent à une Gouvernance mondiale afin d'assurer le maintien de finalités supérieures et non uniquement mercantiles.
En fait, il s'agit quelque part d'encadrer mais surtout de ne pas réformer les lois de la concurrence.
Le terme de "gouvernance" est assez ambigu. La
"gouvernance" fixe les règles et les principes du
"gouvernement", elle définit la manière de
"gouverner". Les termes en italiques partagent une racine commune (piloter une embarcation, le terme
"cybernétique", science du gouvernement, partage aussi la même racine) mais ne sont pas synonymes.
Intérêt : Prendre les décisions les plus opportunes
Vu sous un autre angle, le concept de gouvernance cherche à répondre à l'éternelle question de la
prise de décision efficace au sein d'organisation toujours plus complexe, où l'on ne cerne plus très bien la répartition des pouvoirs, ni les motivations de ceux qui le détiennent, où le processus décisionnel est surtout caractérisé par la confusion due au foisonnement d'intérêts divergents.
Il est aussi bon de bien comprendre que la prise de décision en entreprise n'est pas un acte isolé. Elle s'exprime dans la durée comme la coordination de l'action collective.
La nouvelle complexité induite par la globalisation touche bien sûr de plein fouet les entreprises. De toute façon, il était temps comme le propose la "gouvernance d'entreprise" d'en reprendre
"à plusieurs mains" le pilotage.
En effet, avec l'éparpillement de l'actionnariat, le management exécutif dispose des coudées franches.
Se référer notamment la
théorie des parties prenantes qui tente de formaliser la conception d'une stratégie et d'une gouvernance fondée sur la négociation avec chacune des parties concernés directement ou indirectement par le processus de création de valeurs.
Responsabilité des entreprises et bilan carbone
Il est aussi essentiel d'intégrer la
responsabilité des entreprises en matière de réchauffement climatique au sein des objectifs suivis en priorité par la gouvernance une fois celle-ci établie. Plus précisément,
la mesure et le contrôle des émissions de gaz à effet de serre dues à l'utilisation des énergies fossiles doit impérativement devenir une priorité fondamentale.
Il y a urgence, et celle-ci n'est plus à démontrer : lire notamment le Sixième rapport d'évaluation du GIEC, il ne laisse aucun doute à ce sujet.
La directive CSRD Corporate Sustainability Reporting Directive
Cette directive européenne s'adresse aux grandes entreprises et aux PME cotées en Bourse et fixe de nouvelles normes de
reporting extra financier.
L'objectif de cette directive consiste à évaluer l'impact de l'entreprise et de son activité sur l'environnement à l'aide de
KPI indicateurs de performance orientés développement durable et de plusieurs points de mesure afin d'évaluer les impacts sur l'Environnement, le Social et la Gouvernance.
En référence
Les grands principes de définition de la CSRD
Les ambitions personnelles des managers
Bien trop souvent, le management exécutif est tenté d'accorder la priorité à la performance de son propre compte bancaire plutôt qu'à celle de l'entreprise. À un tel point que, paradoxalement, certains économistes voient d'un bon oeil la prise de pouvoir par les instruments financiers les plus controversés, tels les
hedges funds, private equity et autres outils spéculatifs.
Malgré la quête absolue de la rentabilité, le fameux ROE à 15%, ces nouveaux pouvoirs seraient moins tentés de saborder le vaisseau qu'une équipe d'exécutifs peu scrupuleux attirés par le pot de confiture.
C'est bien pour illustrer la nécessité de contrebalancer les pouvoirs que je glisse ce propos et non pour vanter les effets (méfaits) de la
dérèglementation financière et la libre circulation des capitaux (effective depuis 1986) à l'origine de la multiplication de ces nouveaux instruments financiers spéculatifs bien mal nommés (hedge funds, fond de couverture).
Les conseilleurs ne sont pas les payeurs
Les économistes sus-cités ne sont certainement pas les salariés, débarqués sans autre forme de procès, des divisions insuffisamment profitables aux yeux des nouveaux propriétaires. Ne nous le cachons pas,
le salariat est la variable d'ajustement. Quelque part, la source même de ces gains hors réalité.
Par ailleurs, ces nouveaux instruments financiers en quête de rapides plus-values privilégient les visions à court terme (de 6 mois à 3 ans max), et bloquent ainsi toutes les volontés d'investissement dans la durée... Développement durable, dites-vous ?
"Vous avez voulu échapper à la dictature du prolétariat, vous n'échapperez pas à celle de l'actionnaire spéculateur compulsif".
En tout cas, l'investissement a l'air bien en panne. C'est bien pour cela que la gouvernance d'entreprise susceptible de prendre en compte les multiples intérêts est la solution théorique du moment.
Principe de la gouvernance d'entreprise
Lois et règles comptables
Les scandales financiers des années 2000 comme
Enron, Worldcom ou Tyco sont d'ailleurs à l'origine de nouvelles règles comptables et de nouvelles lois.
l'IAS/IFRS, FRS : International Financial Reporting Standard, IAS : International Accounting Standard, élaborées par IASB, International Accounting Standards Board.
Sarbanes Oxley (SOX) des noms des deux sénateurs ayant portés le projet.
Voir aussi, sur un thème relativement connexe et plus franco-français, la
LOLF, Loi Organique relative aux Lois de Finances (1) et la LSF Loi Sécurité Financière du 1er août 2003.
Une gouvernance soigneusement encadrée
La gouvernance d'entreprise, encadrée par lois (donc sanctions) et règles comptables (donc standards pour une plus grande transparence), maintiendrait, en théorie, les intérêts des principales parties prenantes que sont les actionnaires majoritaires (dont les fonds de pension) et les dirigeants mais aussi les prêteurs ( banques), les actionnaires minoritaires, les salariés, les fournisseurs, les clients et les autres partenaires comme les conseils sous-traitants.
Lire notamment
Le principe de gouvernement d'entreprise de l'OCDE Citation :
"Le régime de gouvernement d'entreprise doit intégrer l'idée que reconnaître les intérêts des parties prenantes et leur contribution à la réussite à long terme de l'entreprise est dans l'intérêt même de cette dernière." Organisation de Coopération et de Développement Economiques 2004.
Nous sommes là tout à fait dans la logique de la réforme organisationnelle sempiternellement ressassée ces dernières années : passer de la pyramide aux réseaux.
Cela dit, pour négocier efficacement, encore faut-il disposer d'un même référentiel.
- En effet, comment concilier des intérêts bien souvent divergents ?
- Comment rapprocher des angles de vue différents ? Voir aussi la la théorie des parties prenantes, une réflexion construite sur la négociation avec chacune des parties concernées par le processus de création de valeur global.
La gouvernance et le développement durable
Le thème de la gouvernance est indissociable du
développement durable.
Une réflexion approfondie à propos de la
mesure de la performance en entreprise, de la définition des indicateurs clé KPI et des tableaux de bord de pilotage s'impose. C'est en ce sens qu'il faut tenter de trouver le référentiel commun, fondement d'une négociation aboutie.
Le tableau de bord au coeur de la gouvernance d'entreprise
Le
système de tableaux de bord et, plus généralement, le système décisionnel sont la première brique à mettre en oeuvre lorsque l'on engage la mise en place d'une gouvernance d'entreprise. En effet, seule une démarche de progrès conduite avec rigueur et méthode et parfaitement pilotée sera le garant de la mise en action d'une gouvernance pleinement efficace.
Il doit être en parfaite harmonie avec les ambitions de la gouvernance
Une fois la vitesse de croisière atteinte, lorsque la gouvernance commence à être opérationnelle, l'efficacité du processus de décision pratiqué en son sein sera étroitement dépendante du type et de la qualité de réalisation du système de mesure de la performance.
Aussi, dès l'ébauche de sa conception, le projet tableaux de bord sera étroitement adapté aux principes de gouvernance pratiqués et aux particularités de l'entreprise, son marché, son management et sa stratégie.
Comment ça marche ?
En quelques mots, la gouvernance est une forme de pilotage multi parties prenantes (stakeholders). Les
décisions ne sont plus le fait d'un unique décideur (ou groupe de décideurs) omnipotent, mais bien le fruit de la concertation après avoir soigneusement pesé le pour et le contre selon les différents intérêts des parties prenantes.
Attention toutefois à la qualité de la
modélisation du processus décisionnel. Un
modèle est toujours réducteur et le processus décisionnel est particulièrement complexe. Attention de ne passe contenter d'une modélisation simpliste, une cause d'échec de premier ordre.
La création de valeur se doit d'être effective au sens de chacune des parties prenantes. En mode optimal, l'échange entre les différentes parties prenantes donc plus le fruit de la négociation que d'un rapport de force.
Le modèle stratégique de Porter ne raisonnant qu'en terme de rapport de forces et de pouvoir sans aborder la question du partenariat n'est peut-être pas le mieux adapté pour répondre aux enjeux actuels. Lire à ce sujet : la théorie des parties prenantes.
Mais est-ce réellement là l'aube d'une nouvelle expression de la démocratie ? Un peu plus participative ? Ou ne s'agit-il que d'une déclinaison de plus du nouvel ordre mondial, une nouvelle couche de vertu complémentaire pour masquer les écarts d'un capitalisme controversé ? À suivre...
Instaurer une gouvernance participative et démocratique
Bien évidemment, une
gouvernance digne de ce nom se doit d'intégrer dans le
processus de prise de décision toutes les parties prenantes de premier rang. Les créateurs de valeur que sont les salariés devraient être placés au premier plan.
Ce n'est pas uniquement pour leur faire plaisir.
Dans un contexte économique perturbé comme le nôtre où l'innovation fait toute la différence pour une rentabilité durable, il faut être vraiment inconscient pour se priver de l'intelligence cumulée de l'ensemble des membres de l'entreprise que ce soit non seulement pour les décisions opérationnelles, mais surtout pour les décisions stratégiques.
Et là, on se heurte à un tabou qui s'appuie sur le mépris de classe.
Donner une part réelle active et responsable aux salariés au sein de la gouvernance n'est pas dans les moeurs pour bien trop d'entreprise.
Dans les pratiques managériales séculaires tout comme pour la croyance populaire, plus on est "haut" dans la hiérarchie et plus "on sait" ce qu'il faut faire.
Quelle erreur ! C'est sur le terrain qu'est l'information, c'est sur le terrain que se prennent les décisions, ce sont les femmes et les hommes face à la réalité qui auront les bonnes idées si on leur en donne les moyens.
Les stratégies émergentes sont vraiment une solution pour remplacer la planification totalement fictive fondée sur des croyances et des sentiments de supériorité.
Il y a bien des années déjà, Henry Mintzberg tentait de révolutionner ces pratiques archaïques du management. C'est effectivement une réforme en profondeur du management qu'il s'agit d'entreprendre si l'on souhaite enfin passer à une gouvernance participative et démocratique digne de notre époque.
Présentation détaillée du livre "la transformation démocratique de l'entreprise"
Pas de gouvernance sans mesure de la performance
La mesure et donc le
choix des indicateurs de performance et la
construction des tableaux de bord sont une fondation essentielle du principe de gouvernance. Le processus de décision est complexe, autant l'assister du mieux possible. C'est là le rôle d'un tableau de bord bien conçu équipé d'indicateurs de performance judicieusement choisis.
C'est le thème du
livre "les tableaux de bord du manager innovant".
Déléguer le pilotage
La gouvernance, c'est aussi la
délégation du pilotage au niveau le plus fin pour que l'entreprise soit ainsi plus réactive voire pro-active. Cet ouvrage explique justement comment déléguer la mesure de la performance pour faciliter la prise de décision sur le terrain, exemples pratiques et outils…
Les notes
↑ (1) On peut aussi comparer la dérèglementation à un casino géant où les perdants systématiques, usagers-consommateurs, petits actionnaires et retraités ne voient ni la roulette ni les enjeux. En référence, le scandale de la dérèglementation de la fourniture d'électricité, réseau, distribution et production en Californie et les pénuries orchestrées par les acteurs privés,
Enron notamment.
Voir aussi la loi
Sarbanes Oxley qui fut la réponse aux scandales financiers du début des années 2000 et les nouvelles règles comptables
IAS IFRS.
L’auteur
Alain Fernandez est un spécialiste de la mesure de la performance et de l’aide à la décision. Au fil de ces vingt dernières années, il a conduit et accompagné de nombreux projets d'entreprise en France et à l'International. Il est l'auteur de plusieurs livres publiés aux Éditions Eyrolles consacrés à ce thème et connexes, vendus à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et régulièrement réédités.
Livre de référence du pilotage de la gouvernance
"
Les nouveaux tableaux de bord des managers" développe précisément la démarche et les pratiques adéquates pour concevoir, réaliser et déployer un système de pilotage, en accord avec les attentes décideurs et en support du déploiement stratégique de l'entreprise. Cet ouvrage, best-seller de sa catégorie, intègre les dernières évolutions qu'elles soient technologiques ou managériales...
Les nouveaux tableaux de bord des managers
Le projet décisionnel en totalité
Alain Fernandez Eyrolles 6ème édition
495 pages
Dispo :
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Format Kindle
Les tableaux de bord du manager innovant
Une démarche en 7 étapes pour faciliter la prise de décision en équipe
Alain Fernandez
Éditeur : Eyrolles
Pages : 320 pages
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Crédit : Image par Shri P de Pixabay
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